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Le Rallye Papa Noël
3 février 2011

Notes d'intention

NOTES D'INTENTION :

 

Cette pièce, qu’est-ce que c’est ?

 

Frédéric Sandona, célèbre chirurgien parisien, participe en solo au rallye Paris Dakar, au volant du 4x4 qu’il a lui-même préparé. Ses enfants et sa femme attendent, admiratifs et impatients, son retour, persuadés qu’il reviendra vainqueur.

Quelque part dans une région du Sahel que traverse le rallye, deux enfants se rencontrent chaque matin, l’une, Kama à la rivière, et l’autre, Rhissa sur la falaise. Ils communiquent par signes et leur amitié grandit de jour en jour.

Mais une erreur de parcours de Frédéric Sandona provoque un accident qui bouleverse tout le village de Kama. Cette erreur est fatale pour le pilote. Pour Rhissa, ce drame est un signe, le moment de réaliser enfin un rêve qu’il porte en lui depuis longtemps.

 

A l’origine, un fait divers, relevé dans le journal Télérama n° 2615 du 23 février 2000 :

 

Le 8 janvier, à Youri, au Mali, un petit village près de Nioro du Sahel, on fêtait la fin du ramadan. Tout le monde était dans la rue. Le rallye a surgi, on ne l'attendait pas: changement de parcours. Kama, heurtée par un motard, a eu la rate éclatée. Transportée à Bamako, à la clinique Farako, par TSO (Thierry Sabine Organisation, filiale d'Amaury Sport Organisation, propriétaire également du Tour de France), on lui a enlevé la rate. Aujourd'hui, recueillie chez ses tantes, dans un quartier populaire de Bamako, elle se remet doucement. Craintive, silencieuse, assise dans la cour, elle regarde jouer les gamins. « Elle est devenue moitié », dit Awa, sa tante, expliquant que Kama ne parle quasiment plus. « Ici, elle peut manger des fruits, de la viande, elle peut se reposer. Mais quand elle rentrera chez elle? Dans la brousse, là-bas, il n'y a rien... Et il faudra qu'elle travaille, qu'elle aille chercher le bois, l'eau, surveiller les chèvres... » L'assurance de TSO a réglé les frais d'hospitalisation, mais après?

 

Dans la pièce, un jour, alors que Kama raccompagne au village Babi, la chèvre dont elle a la garde, Frédéric Sandona provoque l’accident et tue l’animal. Apprenant cela, Rhissa se met en chasse du pilote. En l’éblouissant à l’aide du miroir dont il se sert pour communiquer de loin avec Kama, il parvint à guider Frédéric jusqu’en haut d’une falaise, de laquelle le pilote se jette dans le vide. Gravement blessé, ce dernier est soigné au village de Rhissa. Le pilote ne peut désormais à peine parler, que prononcer quelques sons pour tenter de dire son nom : « … é…ric… …an…ona. » Pour Rhissa, aucun doute, il s’agit bien d’Eric Cantona, le papa qu’il a toujours rêvé d’avoir, le plus grand footballeur de tous les temps !

Avec les pièces récupérées sur la voiture accidentée, Rhissa pourra offrir une nouvelle chèvre à Kama…

 

 

Un théâtre du réel, du quotidien, de la cruauté de la vie dans sa trop grande simplicité, quand une douleur, violente, s’ajoute à ce qui est déjà une difficulté à vivre fondamentale.

Non pas une guerre, non pas une oppression, non pas un viol, non pas une trahison, non pas un inceste, non pas un massacre, non pas un lynchage, non pas une condamnation.

 

Un théâtre de la confrontation.

Il y a ceux qui ne comprennent pas, qui ignorent cette difficulté à vivre fondamentale des autres, qui passent les frontières en les méconnaissant.

Non pas un choc des civilisations, non pas un choc des cultures, mais un aveuglement dû au confort tant désiré, consommé allègrement, avec insouciance, mis en vertige volontairement à des milliers de kilomètres, pour mieux le régénérer.

 

Un loisir, froid, tout bêtement, un loisir de nantis. Une course du sable, des rochers, de la chaleur pour se sentir exister. Parce que, ce qu’il y a de reste dans la vie ne suffit pas, il faut venir chercher ici la mort. Faucheuse. De soi ou des autres. Provoquer cette loterie, consciemment.

Si cela arrive, ce n’est pas tragique, c’est le destin, simplement présenté à chacun. A chacun de l’appréhender, de le questionner.

Il y a une prise en charge, des contrats d’assurance, une résolution médiatique des éventuels événements. Tout est couvert. Dans tous les sens du terme. Au profit des coureurs, des organisateurs. Ceux-là appartiennent à une caste, et la caste protège ses petits, solutionne leurs erreurs.

 

Un théâtre de la confrontation.

Il n’est pas question pour moi d’être manichéen. J’expose un fait, théâtralement transformé par mes intuitions de dramaturge.

Je confronte un fait réel au quotidien de chacun d’entre nous. Je ne fais pas de conférence, je fais une proposition artistique.

Un pilote du rallye Paris Dakar renverse une petite fille dans un village du Mali. Cela n’aurait jamais dû arriver. Dans le réel la petite ne meurt pas, mais dans notre imaginaire probablement que si.

Dans la pièce, c’est un animal qui est renversé et qui meurt, une chèvre, animal précieux pour toute famille du Sahel. Une translation métaphoro-métonymique opère alors dans l’esprit du spectateur, s’ouvre l’éventualité, dans le réel, de la mort violente de la petite fille.

L’atteinte est à la source, l’animal nourricier entre tous est sacrifié.

C’est la vie dans toute sa souffrance qui est touchée, la vie d’une société qui est ébranlée, car elle peut devenir malade par ce fait. Alors elle se reforme, se soude, s’accorde autour de ce malheur supplémentaire, un surplus de douleur dans la fragilité et la dignité.

 

Le rôle de l’auteur dramatique ne serait-il pas de corriger le destin ?

C’est une proposition, mais je n’en reste pas là. Proposer que, dans la pièce, Rhissa récupère littéralement Frédéric Sandona comme père adopté, montre que la cruauté existe également dans cet acte, les enfants blancs privés de leur père souffrent. C’est dire aussi que l’adoption est quelque chose qui est décidé par l’enfant et non pour les parents éventuels. C’est également pointer le système adoptif « casté » nord-sud, nous ne sommes pas loin d’une certaine exclusivité du besoin d’affection …

Le pouvoir néo-colonial existe, il y a toujours une direction nord-sud qui pré-domine, une orientation certaine du pouvoir. Il est conséquent que des événements, à la limite d’une morale, brisent certains tabous qui se voudraient des garants de ce pouvoir. La récupération est un art usuel, vital, développé par les populations soumises à la vie pauvre.

Les pièces de la voiture serviront à l’achat d’une chèvre. Le pilote, cassé, servira de père à Rhissa.

 

C’est une pièce à destination du jeune public et de tous les publics.

En jeu, elle ne devrait pas dépasser une heure.

Je ne doute pas qu’il y aura réellement deux publics.

Le public des villages maliens, lorsque la pièce sera créée et présentée au Mali.

Le public des villes et villages français, lorsqu’elle sera diffusée en France.

Par la connaissance que j’ai de la vie malienne et de ses cultures, j’ai introduit dans les scènes se passant en Afrique, des éléments simples s’y rattachant. Ces éléments sont déjà suffisants pour interloquer le jeune public français.

L’objectif de la création de la pièce au Mali est d’enrichir l’écriture du texte par des éléments plus précis des cultures maliennes, comme des éléments de la langue, certains noms d’objets, des chansons, des formules de magie ou de soins.

 

La pièce contient suffisamment de thèmes propres à faire réagir les publics qu’ils soient jeunes, âgés, maliens ou français.

Une écriture simple porte ces thématiques.

J’ai édulcoré, supprimer le superflus, au point de ne laisser que le sentiment d’un morne temps journalier qui se répète, qui s’est déjà répété, au point de laisser opérer les images créées par les mots, les situations.

Le temps isolé dans sa répétition des deux enfants du nord.

Le temps isolé dans son quotidien des deux enfants du sud.

L’événement grave, l’accident, va provoquer entre eux cette liaison à leur insu.

 

 

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Le Rallye Papa Noël
  • Pièce de théâtre tout public. Création franco-malienne d'après l'oeuvre de Michel Gendarme. Mise en scène par Juliette Lasserre-Mistaudy, de Siphonart, produit par Acrocs Productions, coproduction compagnie Rouletabille et Acte Sept
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